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OBSERVATOIRE DEPARTEMENTAL

DES BOUCHES DU RHÔNE

SUR LES VIOLENCES POLICIÈRES ILLÉGITIMES

 

RAPPORT D’ACTIVITÉ

2006 / 2007

 

NUL MAINTIEN DE L'ORDRE PUBLIC NE PEUT SE FAIRE AU MÉPRIS DES DROITS DE L'HOMME.

 

CIMADE

Ligue des Droits de l’Homme 13

Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples

 

Maison Méditerranéenne des droits de l'Homme, 34 cours Julien, 13006 Marseille

Tél/Fax : 04 91 47 58 17 (LDH) - 04 91 42 94 65 (MRAP) - 04 91 90 49 70 (La CIMADE)

 

SOMMAIRE

 

PRÉAMBULE

 

1  - ESCALADE DU TOUT SÉCURITAIRE ET CULTURE DU RÉSULTAT: LE FOSSÉ SE CREUSE ENTRE LES CITOYENS ET LEUR POLICE.

 

2 - - LES POPULATIONS CIBLÉES

 

            2-1  Les étrangers

            2-2 Les tsiganes

            2-3 Les manifestants

            2-4 Les jeunes

 

3 - CIRCONSTANCES DES VIOLENCES POLICIÈRES ILLÉGITIMES

 

            3-1 Contrôle d'identité

            3-2 Infractions routières ou autres

                        3-2-1 Infractions routières

                        3-2-2 Autres infractions

            3-3 En garde à vue

            3-4 Au commissariat

 

4 - A PROPOS D'OUTILS POLICIERS : L'ARMEMENT ET LES FICHIERS

            4-1 L'armement

            4-2 Les fichiers

 

5 - LE TRAITEMENT JUDICIAIRE

 

6 - LA COMMISSION NATIONALE DE DEONTOLOGIE DE LA SECURITÉ ET SON AVENIR

 

CONCLUSION


 
OBSERVATOIRE DÉPARTEMENTAL SUR LES VIOLENCES POLICIÈRES ILLÉGITIMES

 

RAPPORT D'ACTIVITÉ 2006 - 2007

 

 

« La garantie des droits de l'Homme et du citoyen

nécessite une force publique;

cette force est donc instituée pour l'avantage de tous, et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée. »

 

Article 12 de la Déclaration des droits de l'Homme de 1789.

 


 

PREAMBULE

 

Depuis sa création, l’Observatoire départemental sur les Violences Policières Illégitimes (OVPI) –  composé de la Ligue des Droits de l’Homme 13, du MRAP, de la CIMADE –  affirme son attachement à une police au service du citoyen et respectueuse des droits de l’Homme. La société issue de la République doit notamment pouvoir s’appuyer sur une police à l’éthique républicaine.

 

L’Observatoire départemental sur les Violences Policières Illégitimes :

·                    soutient les victimes de violences policières illégitimes (écoute, conseil, communiqués, conférences de presse…),

·                    recense les différentes affaires pour lesquelles l'Observatoire a été amené à intervenir,

·                    informe le citoyen et interpelle les pouvoirs publics (Préfecture de Police, Tribunaux de Grandes Instances, Parquets...).

 

L’Observatoire rédige un rapport d’activité bi-annuel dans lequel, en s’appuyant sur  les situations pour lesquelles il a été saisi, il dresse un état des lieux et analyse les logiques inhérentes et les causes liées à l’existence de ces violences policières illégitimes. L'objet de l'Observatoire n'est pas de recenser l'ensemble des violences policières illégitimes commises. Néanmoins son activité permet de dégager les tendances fortes en ce domaine.

 C’est ce rapport 2006-2007 qui vous est ici présenté. Comme pour 2004/2005 l'Observatoire a été saisi d'une trentaine de cas.

 Après les « émeutes » de novembre 2005, ces deux dernières années ont été marquées par d’autres évènements graves témoignant d’une réelle dégradation des rapports existant entre la police et la population. Nous pensons là notamment aux évènements de la Gare du Nord en mars 2007, lors de la campagne des élections présidentielles, ainsi qu’à ceux de Villiers-le-Bel en novembre 2007. L’Observatoire souligne qu’à l’origine de ces affrontements, on retrouve toujours un incident plus ou moins dramatique – un accident de la route mortel ou une interpellation – où des policiers se retrouvent impliqués, incidents se transformant rapidement en affrontements.

 Les causes de ces évènements sont multiples, et elles ne peuvent se réduire à la seule dégradation des rapports entre les citoyens et leur police. Sans s’y réduire, cette dégradation indéniable est néanmoins un des éléments majeurs expliquant ces évènements. À Marseille même, l’Observatoire a constaté à plusieurs reprises que nous étions passé très près du même type d’évènements.

 Faut-il préciser que – contrairement aux propos du Président de la République – essayer de comprendre, d’expliquer de tels évènements, ce n’est en rien les « excuser » ? Comprendre doit au contraire permettre d’agir avec efficacité pour que soient mises en œuvre les réponses et les solutions qui s’imposent. Et ce n’est certainement pas la surenchère d’un langage guerrier – où l’on passe de la « racaille » à la « voyoucratie » – s’ajoutant au déni de la question sociale sous-jacente à de tels évènements qui permettront d’avancer dans leur nécessaire analyse. Si ce langage guerrier cherche manifestement à séduire une population désorientée, il vise aussi à masquer l’échec patent d’une politique mise en œuvre depuis plusieurs années par un Ministre de l’intérieur… aujourd’hui Président de la République.

 

I - ESCALADE DU TOUT SÉCURITAIRE ET CULTURE DU RÉSULTAT : LE FOSSE SE CREUSE ENTRE LES CITOYENS ET LEUR POLICE

 

"La police est un instrument de contrainte nécessaire ; mais la réduire à la répression, c'est ignorer l'essentiel : la police ne peut bien se faire (...) que si elle bénéficie de la confiance de la population." (cf. L'état des droits de l'Homme en France, éd. 2005, "Police : marche arrière" par Michel Tubiana.)

 

Or la politique mise en oeuvre depuis plusieurs années dans le domaine de la sécurité ne s'appuie plus que sur son caractère répressif, la dimension préventive de l'action policière ayant été volontairement abandonnée. Sarkosy, alors ministre de l'intérieur, a enterré en grande pompe lors d'un déplacement à Toulouse le 3 février 2003 la police de proximité. La prévention – caricaturée – est assimilée au laxisme et aux parties de football avec les délinquants. Place aux interventions musclées et ... médiatisées. Le contact avec la population étant rompu, il est maintenant fait appel au témoignage sous X, récompensé par une prime, pour susciter la délation comme à Villiers Le Bel en décembre 2007. On ne peut que s'alarmer des conséquences de pareils procédés. 

 

L'intervention de centaines de policiers, hélicoptères à l'appui, dans des cités de la région parisienne ou lyonnaise en est une démonstration caricaturale. Les résultats de ce type d'opérations sont médiocres au regard des moyens déployés, mais peu importe. Ce qui importe, c'est de faire croire qu'avant on laissait faire et qu'aujourd'hui le gouvernement est déterminé à agir. Et pour cela, rien ne vaut la surenchère sécuritaire qui touche l'ensemble du territoire français. Et plus cette politique est inefficace, plus le sentiment d'insécurité et la demande de sécurité augmentent...

 

L'aspect moins voyant de cette politique – sauf pour les populations les plus directement concernées – prend la forme de contrôles systématiques, notamment de personnes sortant ou rentrants dans leur cité. Sous prétexte que force doit rester à la loi – ce que personne ne conteste – la mère de famille, le jeune -... sont souvent plusieurs fois dans la même journée contrôlés par les mêmes policiers. Ou bien encore, comme nous l'expliquait une mère d'une cité marseillaise, « On ne voit plus que la BAC (Brigade Anti-Criminalité) intervenir, et bien souvent comme des cow-boys et avec des injures. Quand il y a un problème de racket à l'école, là on ne voit plus personne... ». La police n'apparaît plus au service du citoyen. Les rapports entre habitants et policiers deviennent extrêmement tendus. Cela se traduit par des attitudes agressives, d'un côté et de l'autre. Comme nous l'avions déjà souligné dans notre précédent rapport, nous observons de plus en plus de situations dégénérant à partir d'incidents très souvent initialement anodins.

 

Cette politique qui peine pour le moins à montrer son efficacité en terme de lutte effective contre l'insécurité – pour ne pas dire qu'elle est tout simplement contre-productive – se propose d'introduire la « culture du résultat ». De quoi s'agit-il ? Comme de nombreux chercheurs l'ont déjà démontrée, la mesure des « résultats » renvoie ici plus à celle de l'activité d'un service – par exemple à travers le nombre de gardes à vue réalisées – que de l'efficacité même de cette activité. De plus, elle oriente l'action des policiers sur le terrain afin de « faire des crânes » comme l'on dit en langage policier, c'est-à-dire faire du chiffre. Comme le notent les auteurs du livre "Police: des chiffres et des doutes" paru aux éditions Michalon, 2007, Jean-Hugues Matelly et Christian Mouhanna, "La "culture du résultat" génère ainsi de l'acrimonie et de l'insatisfaction… parce que les critères retenus ne sont pas pertinents aux yeux des personnels. Elle ne reconnaît pas la qualité et la durée des investissements personnels dans les enquêtes ". Ou bien encore, comme le précise un Officier de Police Judiciaire dans le journal Libération du jeudi 29 mars 2007, " Tout le monde est atteint de "bâtonnite" : on dessine des petits bâtons, on compte le nombre de gardes à vue pour faire chaque année autant ou plus que l'an passé...".

 

Après la mise en œuvre des primes de résultats, la grille de notation des missions de CRS accentue encore la tension. Chaque intervention est désormais notée : à titre d'exemple, l'interpellation d'un conducteur sans permis de conduire vaut 1 point, celle d'un immigré en situation irrégulière vaut 4 points, et celle d'un auteur de vol avec violence 20 points.

Paul Le Guennic, membre du bureau national de l’UNSA-POLICE, qui représente plus de 65 % des CRS syndiqués, déclare «Avec la prime au mérite instaurée par Nicolas Sarkozy, il fallait déjà faire du chiffre (…)Maintenant, avec cette grille d’évaluation, non seulement il faut faire du chiffre, mais en plus il faut choisir les infractions qui font le plus de points. Noter les délits revient à changer le code pénal. Il vaut mieux intervenir sur un feu de poubelles, mais laisser trois voitures griller un feu rouge.»". Pour l’UNSA-POLICE, ces grilles d’évaluation consacrent «une vision statistique de l’ordre public» qui «ne fera que creuser le fossé entre la population et sa police nationale». (Cf. cité par Jacky Durand dans Libération 11 juillet 2007).

En fait, comme le souligne le dernier rapport de la commission nationale Citoyen / Justice / Police – commission composée du Syndicat de la Magistrature, du syndicat des avocats de France et de la Ligue des Droits de l'Homme – "Dès l'année 2003, les débats et l'adoption de la loi de sécurité intérieure font monter la pression psychologique sur la police qui doit désormais montrer son efficacité." Comme l'affirme Jean-Pierre DUBOIS – Président de la Ligue des Droits de l'Homme –dans Libération du 1er juin 2007 "Les policiers ont été pris en otage par un discours sécuritaire depuis des années".

 

Pour le Syndicat de la Magistrature, " L'accumulation des lois répressives stigmatisent plus particulièrement les jeunes et les étrangers comme catégories dangereuses (…) la politique du chiffre imposée à la police encouragent des pratiques de contrôles et d’interpellations systématiques. Cette politique a pour but de diviser de manière artificielle la société en deux camps : celui des bons et celui des mauvais citoyens. Elle a pour conséquence de créer un climat de tension et de défiance entre la population et les forces de l’ordre" (Cf. Communiqué du Syndicat de la Magistrature  du 30/03/07 suite aux incidents survenus à la Gare du Nord).

On peut ajouter qu'au sein de la population elle-même, des agressivités générées par ce climat de défiance provoquent des violences nuisibles au maillage d’un tissu social.

 

 

2 - LES POPULATIONS CIBLÉES

 

L'Observatoire départemental sur les Violences Policières Illégitimes constate que certaines populations se retrouvent particulièrement exposées – voire visées – par la politique répressive gouvernementale mise en oeuvre. Il s'agit principalement des étrangers, des « minorités visibles » – c'est-à-dire des personnes ne semblant pas d'origine métropolitaine – , de manifestants et des jeunes.

 

L'objectif de 25 000 expulsions d'étrangers en situation irrégulière, que le Président de la République Sarkozy a rappelé à son ministre de l'immigration et de l'identité nationale (tout un programme...), a manifestement fortement orienté l'activité des policiers sur le terrain. Cet objectif de 25 000 expulsions (et pourquoi pas 20 000 ou 30 000 ?) pèse effectivement sur les différents échelons de la hiérarchie de l'institution policière, pour aboutir à la multiplication de contrôles au faciès et d'interpellations. Certains policiers supportent de plus en plus difficilement le rôle qu'on leur fait ainsi jouer, au détriment de leur mission de service public et de lutte contre l'insécurité.

 

Comme l'affirme le Syndicat de la Magistrature dans un communiqué du 26 mars 2007 : Son (N. Sarkozy) action au sein de ce ministère restera marquée par la mise en œuvre d’une politique répressive implacable à l’égard de catégories fragiles de la population (mineurs, étrangers, gens du voyage...) érigées en boucs émissaires, et par un affaiblissement des droits de la défense au bénéfice des prérogatives de la police.

 

 

2-1 - LES ETRANGERS OU PERSONNES D'ORIGINE ÉTRANGÈRE

 

Témoignage n° 10 :10 mai 2007 La Fare les Oliviers

*Affaire du Gourbi

                                   Mardi 9 Mai 2006, le propriétaire du terrain du Gourbi est convoqué en Correctionnelle au TGI d'Aix en Provence, pour infractions au Code de l'Urbanisme. (Construction de toilettes sèches et de douches demandées depuis de nombreuses années.)

                Sont présents, plusieurs associations et partis politiques, La Provence, La Marseillaise et TF1. L'audience est reportée, le Procureur n'ayant pas le dossier, l'avocat non plus. La Fondation Abbé Pierre et la Ligue des droits de l'Homme réaffirment leur total soutien au propriétaire et demandent à être cités comme témoins.

                Il s'agit bien d'apporter enfin des solutions de logement aux ouvriers agricoles de la Plaine de Berre, question qui concerne à la fois les communes de Berre, Lançon et La Fare.

                TF1 doit diffuser un reportage au Journal Télévisé de jeudi 11, au soir.

                Mercredi 10, au matin le journaliste de TF1 toujours sur place prévient d'une descente de police. Les hommes racontent l'arrivée brutale de la Gendarmerie, le matin à 6 heures d'une trentaine de voitures, estafettes, 2 bus et des chiens. Certains policiers sont munis de tenailles pour forcer les cadenas des caravanes, mais auraient renoncé à s'en servir. Des hommes ont été menottés, certains laissés à moitié nus dans le froid.

                Midi: 2ème rafle. Les hommes du Gourbi nous ont appelés. Nous avons vu une trentaine de gendarmes, une dizaine de voitures et camionnettes et 2 estafettes, un véhicule de la police municipale. Total : 27 interpellations plutôt musclées : coups de poing, gifles, poignets blessés par les menottes d'après les témoignages des ouvriers relâchés quelques heures plus tard. Deux des interpellés ont dû quitter les lieux en ambulance.

                 Le prétexte de cette descente est une intervention pour démanteler un réseau de trafics de fausses cartes et d'atelier de fabrique de faux papiers et d'arrestation d'un suspect sans préciser que tout cela se passait à Istres bien loin du camp précaire. Mais ça permet d'évacuer le problème central de relogement des habitants du Gourbi qui incombe aux pouvoirs publics et de glaner en même temps quelques expulsables. En effet sur les 27 interpellés, onze sont envoyés au Centre de Rétention d'Arenc mais dans leur dossier, il n'est fait aucune mention de détention de faux papiers.

 

 

Pour Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS, « Les objectifs quantitatifs amènent la police et les préfets à s'attaquer à des personnes qui ne sont pas des délinquants. ». Contre journal de Libération du 3/10/07

 

L' augmentation des contrôles et des interpellations, générées par la mise en œuvre des primes de résultats et de pressions engendre des moyens d'intervention disproportionnés. Le citoyen assiste, à de véritables rafles afin de satisfaire cette obsession du chiffre. Ainsi à Marseille, les rafles se multiplient dans le centre ville, des JLD (Juges des Libertés et de la Détention) et des avocats du Tribunal de Grande Instance  relèvent de nombreuses illégalités de la police qui, s'appuyant sur des réquisitions du procureur de la République, arrêtent des sans-papiers hors des horaires ou des zones indiquées par le procureur. Il n'y a plus d'arrestations au guichet de la préfecture, depuis que le tribunal d'Aix a jugé cette arrestation déloyale (cf cas n° 30, page 9 du présent rapport), mais des policiers entrent en force dans des restaurants du Vieux Port et vont au fond des cuisines arrêter des cuistots et des plongeurs comoriens qui y travaillent.

 

Comme l'indique Jean Pierre Dubois, président de la Ligue des droits de l'Homme, « On est toujours très prudent, parce qu'il y a des mots qui rappellent des choses très fortes mais on assiste depuis plusieurs mois à des opérations systématiques, préparées, qui conduisent à des bouclages d'un certain nombre de zones.(…). L'état de la législation depuis les lois Pasqua, donc depuis très longtemps, autorise des interprétations extrêmement laxistes. C'est-à-dire que si les parquets n'y prêtent pas attention, on peut pratiquement organiser des contrôles d'identité à peu près n'importe où, n'importe quand, avec des conditions de temps et de lieu extrêmement larges.(…). Plus fondamentalement, nous disons à la magistrature vous ne pouvez pas accepter ça. Vous ne pouvez pas accepter d’être à la remorque d’une logique policière. C'est la séquence Nicolas Sarkozy - Brice Hortefeux - les Préfets - la police et, en bout de chaîne, les procureurs, qui répondent à une pression policière ou à une pression politique, et qui mettent l'application du code de procédure pénale en harmonie avec l'exécution d'une volonté politique. La règle de droit devient seconde. Ce n’est pas le rôle décent de la magistrature.» Contre journal de Libération du 27/09/07

 

Pour Laurent Giovannoni, secrétaire général de la CIMADE, « On a vu réapparaître des rafles à partir de 2004 et 2005. Très précisément en application de la politique du chiffre imposée par le ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy qui a donné à ses services un objectif chiffré en matière de reconduites à la frontière. (…). Pour permettre ces contrôles d’identité massifs, il est nécessaire que la police ait un sésame. Or ce sésame ne peut venir que du procureur qui délivre des réquisitions pour procéder à des contrôles d’identité sur un territoire donné.(…). On a vu récemment des réquisitions permettant des contrôles d’identité sur des agglomérations entières. » Contre journal de Libération du 28/09/07.

 

 

Témoignage n° 28 : 8 Août 2007 - Miramas

* Affaire du foyer Saint Exupéry

    Le 8 août 2007, à la suite d'une demande d'expulsion domiciliaire par le CADA (centre d'accueil pour demandeurs d'asile) gérante du foyer St Exupéry, rue des Calanques à Miramas une brigade d'une douzaine de policiers a embarqué à 7 heures 30 du matin. M. H., né en Croatie et V. B. née en Serbie et leurs trois enfants K., 12 ans et D. et V., jumeaux de 5 ans. Ils ont été conduits au commissariat d'Istres.

    Prévenu, un membre à la fois du RESF et de la LDH  d'Istres, JE J. s'est rendu au commissariat vers 11h00 et a pu voir les enfants.

Il a demandé à voir l'officier de police judiciaire chargé de l'affaire et a attendu jusqu'à 13h00.

    Prévenue la présidente de la fédération de la LDH a appelé avec insistance la sous-préfecture. La commissaire les a finalement reçus vers 16h00 pour leur dire qu'elle croyait avoir affaire à un couple sans enfant, que le CRA de Marseille était plein et que la famille était sous le coup d'une APRF.(Arrêté préfectoral de reconduite à la frontière).

    Après l'intervention de La présidente de le Fédération de la LDH, la famille a été finalement relâchée vers 18h30 avec un ordre de quitter le territoire français (OQTF) et interdiction de revenir au foyer récupérer leurs affaires. Toutes les affaires de cette famille ont été embarquées vers un garde-meuble situé… dans le 11ème arrondissement de Marseille!

             

Certaines expulsions sont accompagnées de violences :

 

Témoignages n°22: 28 février /13 mars 2007 et 24 octobre 2007 - CRA du Canet - Marseille

* Affaire du jeune kurde  S.T.

Arrêté le 28 février, S.T., jeune kurde de 19 ans n'ayant pas de titre de séjour, est retenu au Centre Administratif de Rétention du Canet. Il est en grève de la faim depuis le 9 mars comme 5 autres jeunes kurdes prisonniers. Il aurait reçu des coups. Il aurait été ligoté et frappé. Le vendredi 2 mars il dépose plainte pour coups et blessures par personnes dépositaires de l'autorité publique en s'appuyant sur un certificat médical.

   S.T. refuse d'embarquer mardi 13 mars à Marignane dans l'avion qui devait l'acheminer vers la Turquie :  n'ayant pas fait son service militaire  il risque la prison dès son arrivée. Il a en effet reçu un papier officiel l'attestant.

   Nouveau projet d'expulsion pour le vendredi 16 mars à 6h50 de Marignane, qui n'aura pas plus de succès. Â son retour au centre de rétention S.T. est épuisé et porte des traces de piqûres.

   Le 17 mars 2007 il est embarqué par avion spécial jusqu'à Paris afin de procéder à son expulsion. Il doit décoller de Paris pour Istambul dans la soirée mais il refuse d'embarquer et il est déféré devant le tribunal de Bobigny qui le libère en lui laissant un an pour régulariser sa situation.

 

                            24 octobre 2007 : S.T. se présente spontanément à la préfecture pour y déposer son dossier de régularisation, conformément à la décision du tribunal de Bobigny. Il est accompagné par sa compagne et trois militants. Il y est arrêté. Il passe la journée à la PAF et est conduit au CRA à 19h00.

   Il passe vendredi 26 octobre devant la Juge des libertés et de la détention qui confirme sa rétention.

   Il passe en appel le 27 à Aix. Le tribunal le libère, la cour ayant estimé son arrestation déloyale.

 

Ces violences peuvent être accompagnées d'humiliations et de propos racistes:

 

Témoignage n° 24  le 26 avril 2007 : C.R.A. du Canet - MRS

*Affaire M. K.

   Algérien, en France depuis 7 ans,    M. K. s'est présenté à la préfecture le 26 avril pour savoir où en était son dossier de régularisation. Il a été directement conduit au Centre de Rétention Administratif du Canet où le Juge des Libertés et de la Détention a confirmé son maintien en rétention en vue de son expulsion.

   Le 1er mai, M. K. a été conduit au port de Marseille pour être convoyé sur le paquebot Méditerranée en partance pour l'Algérie. À l'appel de RESF une partie de la manifestation syndicale du 1er mai s'est déroutée sur le port afin d'empêcher l'embarquement de M. K.. Les marins du bateau ont refusé d'appareiller grâce à l'action du syndicat CGT.

   Il a tenté de se mutiler avec une ampoule qu'il avait pu saisir.  Il a été conduit aux urgences à l'hôpital Nord en caleçon. La police lui refusait son pantalon. Il a fallu l'intervention de l'équipe soignante pour qu'il puisse se vêtir. Puis il a été conduit dans une cellule d'isolement au CRA.

   Il dénonce les violences qui lui auraient été infligées dès son départ du CRA le 1er mai au matin car il refusait de sortir de sa cellule. Il aurait reçu des coups de pieds dans les côtes et sur le reste du corps et aurait été traité de sale arabe par des agents de la PAF.

   M. K. a été libéré le 12 mai à 15h00. Il avait perdu 11 kg.

   Il a obtenu une carte verte APS soit une autorisation provisoire de séjour de 6 mois, sans autorisation de travailler.

 

Témoignage n° 18 : 17 novembre 2006 - Préfecture de Marseille

* Affaire M. A.

   M. A. a fait l’objet d’une interpellation alors qu'il était venu solliciter un titre de séjour au guichet de la Préfecture. Deux policiers sont arrivés et lui ont dit « venez Monsieur on va vous expulser ». M. A. leur a rétorqué qu’il ne pouvait pas être expulsé, qu’il avait déposé un recours et leur a demandé de contacter son avocat. Etant saisi quand même par les policiers, son épouse s’est interposée. Elle a été écartée et projetée au sol avec son bébé dans les bras. Puis les policiers ont projeté M. A. contre le mur du fond de la salle des guichets et l'ont maintenu en procédant à un étranglement. Pendant ce temps, un 3éme policier est arrivé qui barrait le passage à Mme A. Ils ont ensuite conduit M. A. dans la salle d’attente où, alors qu’il était tombé, il a été menotté devant tous les demandeurs présents ce jour-là. S., salariée à la Maison méditerranéenne des droits de l'Homme, est intervenue en  demandant d’arrêter de brutaliser M. A. et en disant au policier qu'il était en train de commettre une bavure mais l’agent lui a répondu « ferme-la, casse-toi». A ce moment-là S. lui a signalé qu’elle travaillait pour le MRAP et la LDH. Mais un autre agent lui a répondu « on s’en fout vous n’avez qu’à faire ce que vous voulez ».

   Pendant ce temps, M. A. avait été descendu de force dans le local de la police situé au sous-sol de la Préfecture. Là, un 1er policier l’aurait poussé et giflé 4 fois pendant que les 2 autres le tenaient par les épaules ; puis il a été maintenu sur une chaise puis menotté. Il a ensuite été amené en GAV au commissariat de police de Noailles.

    Il y a été auditionné, puis remis en cellule avant d’être conduit à l’Evêché. M. A. avait été fouillé une première fois à la Préfecture où on l’avait fait mettre nu puis une seconde fois par les mêmes policiers à son arrivée à Noailles.

   M. A. n’a été relâché de GAV que le lendemain, soit le 18 novembre 2006 à 10h45 : il a donc passé pas loin de 20H en GAV.

   À la fin de sa GAV, un rappel à la loi lui a été remis par l' OPJ l’informant que le Procureur renonçait à toute poursuite judiciaire pour les faits réprimés aux art 433-6 et 433-7 al1 CPP (résistance avec violence à …).

   Pourtant le même jour, alors que M. A. était rentré chez lui à Vitrolles, un policier est venu à son domicile pour lui remettre une convocation en justice pour les faits réprimés aux art 433-5 al2 CPP (outrages, gestes, menaces…), 433-6 et 433-7 al1 (vus précédemment) et 222-13 al1 (violences sur…). Ce même policier lui a même fait déchirer le précédent rappel à la loi  qui lui avait été remis à la sortie de sa GAV… (fort heureusement une copie avait été faite par les époux A. et est en notre possession !)

   Depuis M. A. a obtenu sa régularisation. Il reste aujourd'hui fortement traumatisé.

 

M.A. a subi deux fois une fouille à corps : une fois à l'Evéché, une fois au commissariat de Noailles. Rappelons donc ici que la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité (C.N.D.S.) dans son rapport 2006 p.26 précise que « La fouille à corps est une brimade inutile. La commission, recommande que cette circulaire (relative à la fouille de sécurité) soit complétée sur ce point : la mise en œuvre d'une telle mesure devrait être expressément mentionnée dans un procès verbal exposant les raisons ayant conduit l'officier de police judiciaire à la décider." . Le ministère de l'Intérieur ne retient pas le principe de la motivation juridique de la fouille à corps… Il a toutefois demandé à l'inspection générale de la police nationale d'étudier la généralisation d'un dispositif avec "mention systématique de l'exercice d'une fouille de sécurité sur le registre administratif sur lequel figurent les mentions relatives au dépôt d'éventuels objets par les personnes retenues ou gardées à vue. La Commission a fait observer au ministre qu'elle maintenait sa recommandation, la fouille de sécurité étant une mesure de contrainte exceptionnelle, pour laquelle le parquet doit être mis en mesure de contrôler l'opportunité et les modalités d'exécution; elle doit, pour ce motif, donner lieu à l'établissement d'un procès verbal. »

 

La CNDS est peu saisie par les étrangers qui craignent qu'une saisine soit un obstacle à leur régularisation. M.A a longuement hésité à porter plainte contre les policiers. Aujourd'hui, régularisé il envisage de le faire.

 

2 -  2  LES TSIGANES

 

Témoignage n° 11 : 12 mai 2006 Mirabeau Marseille

* Affaire : J.P.  J.V.  M.A. et  R.G. 

   Vers 13h00 une voiture banalisée est entrée sur le terrain Mirabeau, où résident des familles tsiganes pour arrêter une personne qui s'est débattue et a réussi à s'enfuir.

Il semble que voulant interpeller des jeunes qui échangeaient des montres en or la voiture de police a reçu des pierres. Ils auraient été une cinquantaine à vouloir protéger les jeunes, d' après la police, ce qui semble très exagéré.    

   Vers 18h00 les policiers font une descente dans la cité (une dizaine de petits cars blancs et bleus). Ils laissent entrer mais pas sortir et procèdent à des contrôles d'identité dans chaque maison  et à des interpellations dont : un jeune de 14 ans J.V. qui venait d'arriver avec ses parents, J.P. qui arrivait de l'hôpital où il avait passé tout l'après midi, M.A., 20 ans, de la famille du gardien du Centre social, et le jeune R.M., chaque fois devant les familles impuissantes.

   Les policiers auraient été arrogants et agressifs. Certains avaient des cagoules. Une femme qui voulait des nouvelles de son frère aurait reçu une balle de flashball dans la jambe.

   Un policier les a reconnus formellement comme les auteurs (entre autres) des jets de pierres : dégradation volontaire d'un véhicule de police en réunion. Deux d'entre eux étaient accusés d'avoir commis "volontairement des violences sur un fonctionnaire de police".

   Après 48h00 de garde à vue, ils ont été placés sous contrôle judiciaire.

   Ils ont comparu le 14 juin à 8h30 devant la 5ème chambre. Ils ont été relaxés, l'avocat ayant insisté sur l'absence de preuve et les policiers n'ayant pas confirmé leur déposition initiale les reconnaissant formellement et ayant renoncé à porter plainte…

Pour avoir l'intégralité du rapport demander le en envoyant un émail à l'adresse de la LDH  Istres Ouest Provence

ldh.istres@free.fr



 


 


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